Jeunes sportifs de haut niveau
Les enfants et adolescents qui envisagent une carrière dans le sport en demandent beaucoup à leur corps. Le Prof. Dr méd. Johannes Scherr, médecin-chef et Directeur du Centre universitaire de prévention et de médecine du sport de la Clinique universitaire de Balgrist, attire l’attention sur les règles à respecter lorsqu’ils s’entraînent.
Pourquoi le sport est-il bon pour tous les enfants et adolescents?
Prof. Dr méd. Johannes Scherr:* Aujourd’hui, on sait que le plaisir de bouger s’imprègne dès la prime enfance. Un enfant actif appréciera de continuer à bouger régulièrement à l’âge adulte, car le sport est associé à quelque chose de positif. Par contre, les enfants qui, depuis tout petits, bougent peu et à contre cœur, ont plus tendance à devenir des adultes rivés à leur canapé. Les enfants en surpoids ont souvent une mauvaise expérience du sport à l’école: on se moque d’eux car ils s’y prennent mal ou n’ont pas d’endurance. Résultat: ils boudent le sport pendant l’enfance puis en tant qu’adultes. Ils sont donc plus souvent en surpoids et ont un risque accru de problèmes cardiovasculaires, de maladies métaboliques et de cancer.
À quel point les futurs sportifs de haut niveau doivent-ils s’entraîner?
On peut dire que le temps nécessaire pour l’entraînement est pour une part corrélé au talent de l’enfant: plus il est talentueux, moins il devra s’entraîner et inversement. D’autre part, l’entraînement dépend aussi du type de sport. En gymnastique artistique p. ex. le zénith sportif arrive très tôt et exige un entraînement pouvant aller jusqu’à 20 heures par semaine chez des enfants. Dans le sport d’endurance, cette apogée arrive plus tard, entre 20 ans et le début de la trentaine.
À quoi faut-il faire attention chez les jeunes sportifs de haut niveau?
Les adolescents n’ont pas fini leur croissance. En règle générale, il faut veiller à éviter les blessures, surtout au niveau du cartilage de croissance. Je déconseille la musculation intensive qui implique des levers de poids élevés avec peu de répétitions. La situation musculosquelettique et hormonale des enfants et adolescents n’est pas optimale pour de telles pratiques. En plus, dans ce type de sport, les os et les muscles risquent de ne pas se développer de manière proportionnelle et les leviers peuvent se modifier. Il est judicieux de faire un travail de stabilisation, qui combine force et endurance[A1] . Ce type d’entraînement améliore la motricité. Par ailleurs, les études ont montré qu’il réduit le risque de blessure d’un tiers environ.
Les futurs sportifs de haut niveau doivent globalement améliorer leurs capacités athlétiques. Le mieux pour cela est de combiner différents sports, par exemple football et renforcement musculaire. On réduit ainsi le risque de blessure de surmenage.
Pendant la poussée de croissance de la puberté, l’entraînement doit être adapté en tenant compte de l’évolution de la situation sur le plan osseux, musculaire et conjonctif. Chez les filles, par exemple, le centre de gravité se déplace avec le développement de la poitrine.
Quelles sont les blessures sportives les plus fréquentes chez les jeunes?
Il s’agit souvent de blessures traumatiques comme les fractures et les élongations ou ruptures ligamentaires. Le risque de blessure est aussi influencé par les hormones, qui peuvent avoir un rôle protecteur sur l’appareil ligamentaire, mais aussi favoriser certaines blessures. Le risque de lésion du ligament croisé antérieur augmente par exemple chez les jeunes sportives de haut niveau.
Les blessures de surmenage sont également courantes chez les jeunes athlètes. Notamment les fractures de fatigue de l’épaule, du coude ou du rachis. Ces blessures surviennent quand les os ne sont pas suffisamment stables par rapport aux forces qui s’exercent directement ou à la traction des muscles: autrement dit, les os cassent quand les muscles tirent trop et trop souvent dessus. Un entraînement trop intensif peut aussi provoquer une inflammation du cartilage de croissance au niveau des talons ou une irritation douloureuse de la partie antérieure supérieure du tibia due au détachement de petites particules d’os. Les petites fractures de fatigue cicatrisent généralement sans opération mais exigent une mise au repos.
Quels sont les autres problèmes possibles chez les jeunes sportifs de haut niveau?
Surtout chez les filles, mais parfois aussi chez les garçons, le sport intensif peut entraîner un certain manque d’énergie. Les jeunes touchés s’alimentent normalement mais dépensent plus d’énergie qu’ils n’en apportent. Cela peut affecter l’équilibre hormonal et favoriser une minéralisation insuffisante des os. Les filles peuvent aussi présenter une aménorrhée (absence de règles). Les problèmes surviennent souvent quand les enfants commencent très jeunes le sport de haut niveau ou passent trop vite de rien à tout.
Les blessures sportives de l’adolescent guérissent-elles aussi bien que celles de l’adulte?
En général, les blessures osseuses, ligamentaires et musculaires cicatrisent mieux qu’à un âge plus avancé, car les cellules se renouvellent plus vite à cet âge. La densité osseuse maximale est atteinte à la fin de la vingtaine. Puis elle diminue. Chez les femmes, la densité osseuse baisse de nouveau fortement après la ménopause, avec des fractures qui surviennent plus facilement et cicatrisent moins bien.
Comment traite-t-on les blessures sportives?
En cas de lésion osseuse, il est primordial de replacer l’os cassé dans la bonne position et de le mettre au repos en l’immobilisant avec un plâtre. Il est parfois nécessaire d’opérer pour stabiliser la fracture à l’aide d’une plaque, de vis ou d’un clou.
En cas de blessure de surmenage, il faut décharger la zone touchée. Pour éviter une nouvelle fracture de fatigue au même endroit, je recommande un entraînement ciblé afin de remédier préventivement au déséquilibre à l’origine de la blessure.
*Prof. Dr méd. Johannes Scherr, médecin-chef et Directeur du Centre universitaire de prévention et de médecine du sport de la Clinique universitaire de Balgrist.
Cet article a été publié dans une édition d’astreaPHARMACIE et adapté pour le site web. L’édition complète d’astreaPHARMACIE est disponible en pharmacie et paraît dix fois par an.